L’objectif de cette étude est d’examiner l’hypothèse selon laquelle la quarta natura, théorisée par Épicure pour rendre compte des activités de l’âme et décrite par Lucrèce (DRN III, 237-244), résulte de l’appropriation par Épicure d’un argument aristotélicien afin de répondre aux critiques d’Aristote à l’égard de la théorie démocritéenne de l’âme. Pour ce faire, on analysera le témoignage de Cicéron (Tusc. I, 10, 22) sur le quintum genus attribué à Aristote et on rendra compte des débats sur se…
Read moreL’objectif de cette étude est d’examiner l’hypothèse selon laquelle la quarta natura, théorisée par Épicure pour rendre compte des activités de l’âme et décrite par Lucrèce (DRN III, 237-244), résulte de l’appropriation par Épicure d’un argument aristotélicien afin de répondre aux critiques d’Aristote à l’égard de la théorie démocritéenne de l’âme. Pour ce faire, on analysera le témoignage de Cicéron (Tusc. I, 10, 22) sur le quintum genus attribué à Aristote et on rendra compte des débats sur ses sources possibles. En confrontant le témoignage cicéronien avec les vers dans lesquels Lucrèce expose la théorie de la quatrième nature, on montrera les fortes ressemblances entre leurs structures argumentatives. Sur la base de la possible datation de la théorie de la quintessence et de son attribution au Péripatos du iie siècle av. J-C, on proposera d’expliquer cette similarité par l’appropriation par Lucrèce de l’argument par soustraction qui caractérise la théorie de la quintessence, à partir de laquelle il aurait conçu la théorie de la quatrième nature. Afin de vérifier l’exactitude de cette interprétation, on examinera l’hypothèse selon laquelle l’appropriation de cet argument, et donc la conception de la quatrième nature, remontent à Épicure, la paternité de l’argument par soustraction (à partir duquel les péripatéticiens postérieurs pourraient avoir conçu la théorie de la quintessence) étant alors à attribuer à Aristote. Pour ce faire, on analysera un passage du De Caelo (269a30-269b2) et un passage de La Génération des animaux (736b29-737a1) où l’argument par soustraction sert à introduire d’une part l’éther et d’autre par le pneuma. Ensuite, en s’appuyant sur l’analyse d’un passage du De Anima (405a5-7), on montrera que l’appropriation de cet argument pourrait s’expliquer par la tentative, de la part d’Épicure, de répondre à une critique aristotélicienne concernant la théorie démocritéenne de l’âme.