Zaki Beydoun

Le problème du schématisme transcendantal est le moment de la Critique de la raison pure où la question de la signification des catégories pousse Kant à remettre en question l’indépendance de l’imagination productive et de l’intuition à l’égard de l’entendement, position que la première rédaction de la Déduction transcendantale partageait encore avec « L’esthétique transcendantale » et la Dissertation de 1770. Ce revirement devient plus explicite et résolu dans la seconde rédaction de la Déduction transcendantale, sans que l’imagination productive, la faculté des intuitions pures, se trouve pour autant réduite à une fonction de l’entendement : si « la synthèse transcendantale de l’imagination » est « un effet de l’entendement sur la sensibilité » selon cette rédaction ( KRV, B 152), c’est parce qu’elle résulte de la détermination a priori, par ce dernier, de certaines activités représentatives pré-conceptuelles dont Kant reconnaît la présence dans la sensibilité animale.

Nous tentons ici de démontrer que le concept du temps absolu, tel qu’il intervient dans le texte des « Analogies de l’expérience », renvoie à une idée régulatrice de la raison qui joue, dans la théorie kantienne de l’expérience, un rôle parallèle à celui qu’attribue Kant à l’idée régulatrice de l’espace absolu dans les Premiers principes métaphysiques de la science de la nature. Dans ce cadre, il s’agit d’établir une distinction nette entre l’idée du temps absolu et l’intuition pure du temps, ainsi que de démontrer que les principes dynamiques de l’entendement pur et, corrélativement, la possibilité de l’expérience, reposent sur cette idée.